Groupe familial

Désignation d’un mandataire successoral

La désignation d’un mandataire successoral n’est pas réservée aux successions indivises, mais a vocation à s’appliquer à toute succession, de sorte qu’il y a lieu de l’ordonner lorsque la mauvaise gestion et la diminution du patrimoine successoral compromettent l’intérêt commun du légataire universel et des autres héritiers réservataires, quand bien même il n’y aurait pas d’indivision entre eux.

Un père décède, laissant ses cinq enfants pour lui succéder. L’un d’entre eux avait été désigné légataire universel, de sorte qu’il n’y avait pas d’indivision entre ce dernier et le reste de la fratrie. Le légataire universel était seulement tenu de verser une indemnité de réduction afin que ses cohéritiers soient pourvus de leur réserve, en application de la règle selon laquelle la réduction s’effectue, en principe, en valeur (C. civ., art. 924). En raison de charges de copropriété impayées, le syndicat des copropriétaires d’un immeuble dépendant de la succession a demandé et obtenu devant les juges du fond la nomination d’un mandataire successoral, sur le fondement de l’article 813-1 du Code civil. Le légataire universel et l’une de ses sœurs ont formé un pourvoi en cassation aux motifs notamment que « l’inertie, la carence ou la faute d’un ou plusieurs héritiers ne peuvent justifier la désignation d’un mandataire successoral que si celles-ci ont des conséquences, non point sur la gestion des biens dont ils ont hérité, mais sur l’administration de la succession, ce qui suppose qu’il y ait une succession à administrer ; que tel ne saurait être le cas en présence d’un légataire universel, seul propriétaire des biens issus de la succession, qui n’est plus à administrer ».

La Cour de cassation rejette le moyen, estimant que l’arrêt d’appel énonce exactement que l’article 813-1 du Code civil n’est pas réservé aux successions indivises, mais a vocation à s’appliquer à toute succession et que, si le légataire universel n’est pas en indivision avec les autres héritiers réservataires, la mauvaise gestion et la diminution du patrimoine successoral compromettent leur intérêt commun ; qu’il relève que, depuis le décès, une grande partie des charges de copropriété est impayée, que le défunt les a contestées sans toutefois engager d’action pour faire trancher ce litige, qu’aucune attestation immobilière portant sur la propriété des lots n’a été publiée depuis huit années, ce qui entrave les diligences que le syndicat des copropriétaires peut entreprendre pour recouvrer la dette et qu’il n’est pas démenti que l’immeuble se dégrade, en l’absence d’entretien et de travaux ; qu’il ajoute que la situation conflictuelle entre le légataire universel et les autres héritiers réservataires retarde également le règlement de la succession ; que de ces énonciations et constatations, caractérisant l’inertie et la carence du légataire universel dans l’administration de la succession et la mésentente entre héritiers, la cour d’appel a pu déduire qu’il convenait de désigner un mandataire successoral.

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Cass. 1re civ., 17 oct. 2019, n° 18-23.409