Sur l’acceptation à concurrence de l’actif net
Acceptation à concurrence de l’actif net : les créances, y compris lorsqu’elles sont assorties d’un titre exécutoire antérieur au décès du débiteur, doivent être déclarées au domicile élu de la succession et non être directement adressées aux héritiers.
En application des articles 788 et 792 du Code civil, lorsque la succession a été acceptée par un héritier à concurrence de l’actif net, les créanciers de la succession doivent déclarer leurs créances en notifiant leur titre au domicile élu de la succession, lequel est indiqué dans la déclaration d’acceptation de l’héritier ; le délai de déclaration des créances soumises à cette formalité, d’une durée de quinze mois, court à compter de la publicité nationale dont fait l’objet la déclaration d’acceptation de l’héritier ; à défaut de déclaration dans le délai imparti, les créances non assorties de sûretés sur les biens de la succession sont éteintes à l’égard de celle-ci.
Inspirée de celle applicable en matière de procédure collective, cette procédure de déclaration de créances est rigoureuse. La sanction de l’extinction s’applique à toutes les créances (non assorties de sûretés réelles), quelle que soit leur fondement. En particulier, le fait que le créancier bénéficie d’un titre exécutoire avant le décès de son débiteur ne lui permet pas de se soustraire à l’obligation de déclaration. C’est ce que la Cour de cassation a eu l’occasion d’indiquer dans une décision rendue le 22 mars 2017.
En l’espèce, le liquidateur d’une société Y… avait adressé une demande en paiement d’une créance que celle-ci détenait à l’encontre de Pathom X…, décédé. En dépit du défaut de déclaration de la créance, il a obtenu gain de cause devant la cour d’appel au motif que la société Y… disposait, avant le décès, d’un titre exécutoire à son encontre constitué par le jugement assorti de l’exécution provisoire, de sorte que l’actif de la succession était amputé des condamnations prononcées par le tribunal. La décision est cassée au visa de l’article 792, alinéa 2, du Code civil, les juges du fond s’étant déterminés par un motif inopérant au regard de l’obligation faite au créancier de déclarer sa créance dans le délai qui s’impose à lui.
Quant à la déclaration de créance, conformément aux termes de l’article 792, aliéna 1er, du Code civil, elle doit se faire au domicile élu de la succession (en général l’étude du notaire en charge de son règlement), ce que la Cour de cassation a rappelé dans un arrêt du 8 mars 2017. Dans cette affaire, mis en examen pour l’assassinat de Jean-Marc X…, Hugues Y… s’était donné la mort le 4 mai 2012, laissant pour lui succéder son fils Thomas. Le 7 juin 2013, celui-ci a déclaré accepter la succession à concurrence de l’actif net. Une commission d’indemnisation des victimes d’infraction ayant accordé à des membres de la famille de Jean-Marc X… des indemnités, le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions a obtenu d’un juge de l’exécution l’autorisation de procéder à la saisie conservatoire de comptes bancaires ouverts au nom de M. Y… pour obtenir le paiement de sa créance subrogatoire. Il s’est adressé directement à Thomas X… pour l’informer de sa réclamation portant sur une somme de 44 500 euros, dans le délai de 15 mois à compter de la publicité dont la déclaration d’acceptation avait fait l’objet. Pour les juges du fond, cette réclamation devait être assimilée à la déclaration de créance de l’article 792 du Code civil dès lors que Monsieur Thomas X… était l’unique héritier de son père, de sorte que celui-ci n’était pas fondé à demander la mainlevée de la mesure conservatoire.
La suite de cet article a été publiée sur le site Lexis 360.
Cass. 1re civ., 8 mars 2017, n° 16-14.360 ; Cass. 1re civ., 22 mars 2017, n° 15-25.545