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Révocation tacite d’un testament refusée

La révocation tacite d’un testament ne peut résulter que de la rédaction d’un nouveau testament incompatible, de l’aliénation de la chose léguée ou de la destruction ou de l’altération volontaire du testament.

Par acte authentique du 28 décembre 2007, Alain X… fait donation à sa fille, Marielle, de la nue-propriété de cent-vingt parts d’une société civile immobilière (SCI), avec réserve d’usufruit à son profit, sa vie durant, puis, après son décès, au profit de M. Y… Alain X… décède le 2 janvier 2008, en laissant sa fille pour lui succéder. Invoquant un testament olographe daté du 5 décembre 2003 par lequel Alain X… lui a notamment légué une rente viagère mensuelle de 4 580 euros à prélever sur les revenus de la SCI, M. Y… assigne Mme X… en délivrance de son legs.

Il est débouté de sa demande par un arrêt infirmatif de la cour d’appel d’Orléans, qui considère qu’il résulte de la correspondance échangée entre Alain X… et son notaire que la donation établie au profit de M. Y… constitue la mise en application effective des conseils donnés par l’officier ministériel, que la volonté du de cujus, qui a suivi les conseils à la lettre, a été de constituer au profit de M. Y… une rente d’environ 60 000 euros par an et, pour parvenir à cet objectif, de substituer au mécanisme mis en place par le testament, celui instauré par la donation, plus avantageux fiscalement, et non de cumuler les deux, ce qui aboutirait à un résultat incompatible avec la volonté du donateur, puisque dépassant de très loin la constitution d’une rente de 60 000 euros par an et laissant les incidences fiscales auxquelles l’intéressé voulait échapper, que l’absence de révocation expresse du testament résulte, soit d’une omission dans l’acte de donation, soit, plus vraisemblablement, de la volonté de procéder à cette révocation par acte séparé, le décès d’Alain X…, survenu quelques jours à peine après l’établissement de l’acte de donation, ayant à l’évidence matériellement empêché qu’il soit procédé à l’établissement de ce second acte. Les magistrats d’appel en déduisent que la donation a nécessairement entraîné la révocation des dispositions relatives au legs de la rente mensuelle de 4 580 euros, incompatibles avec la constitution d’une réserve d’usufruit portant sur plus de cent-vingt parts de la SCI.

Au visa des articles 1035, 1036 et 1038 du code civil, la Cour de cassation casse la décision d’appel, énonçant que « la révocation tacite d’un testament ne peut résulter que de la rédaction d’un nouveau testament incompatible, de l’aliénation de la chose léguée ou de la destruction ou de l’altération volontaire du testament ».

Un commentaire de cet arrêt a été publié sur le site Lexis 360.

Cass. 1re civ., 8 juill. 2015, n° 14-18.875